Lac Tonlé Sap

                          rond006 Dimanche 15 Décembre 2019 (suite)

              Après les visites culturelles de ce matin : les temples Banteay Srei et Banteay Samré,  c’est une promenade tranquille qui est prévue cette après-midi : la découverte du lac Tonlé Sap distant d’une dizaine de kms au Sud de Siem Reap. Mais qu’a donc ce lac, si important pour le Cambodge, de tellement particulier ? Lac reconnu comme biosphère par l’UNESCO en 1997. (point N° 24 carte itinéraire)

             Ce lac, le plus grand lac d’eau douce d’Asie du Sud-Est, possède un régime d’écoulement alternatif très rare dans le monde :  en saison sèche (Février à Juin), ses eaux coulent vers le Mékong, mais s’inversent à la saison des pluies (Juillet à Novembre) lorsque le Mékong, est gonflé, non seulement des pluies mais aussi de la fonte des neiges himalayennes. Les eaux du  mythique fleuve alors en crue,  se jettent dans le lac situé plus bas, inondant au passage toutes les forêts et les champs alentour, zone alors nommée  « mangroves d’eaux douces » La fête des Eaux se situe au moment ou les eaux sont les plus hautes.

            La surface du lac peut alors atteindre 16 000 Km² au lieu des 2700 Km² en saison sèche. La profondeur varie de 1 à 9 mètres. L’inondation saisonnière est un milieu idéal pour la reproduction des poissons, et en se retirant, les eaux laissent de riches dépôts nutritifs de sédiment, de l’or pour l’agriculture.


            Et Bunthorn de raconter «   A l’origine, la superficie des forêts autour du lac étaient de 100 000 km², mais aujourd’hui il n’en reste plus que 30000 km², ce taux de perte de 1% par an est dû au défrichage pour l’agriculture, au brûlage pour chasser les animaux et à la coupe des arbres pour chauffer les habitations des maisons lacustres. » 

         Le lac est connu pour ses villages lacustres et ses habitants, en grande partie des expatriés Vietnamiens qui ont fui leur pays en 1970 lors de la guerre contre les Américains, ceux-ci vivent essentiellement de la pêche.

             « Autrefois le gouvernement avait mis en place des restrictions, mais aujourd’hui c’est totalement libre, interdit toutefois aux pêcheurs industriels, chacun a le droit d’y pêcher, et d’amener ses filets, de petites ou grandes mailles, peu importe,  tant il y a de poissons ! » Car effectivement,  le Tonlé Sap est l’une des zones de pêche d’eau douce les plus productives du monde, avec 75% du volume annuel du pays, une véritable providence pour ces millions de personnes qui vivent dans la région, quoiqu’aujourd’hui avec  la construction des barrages hydroélectriques sur le Mékong, cette manne pourrait bien se tarir.

               « Les plaines inondées appartiennent aux habitants des 6 provinces, à la saison sèche ceux-ci font pousser du riz, ce qui est impossible à la saison des pluies, ils édifient de petits barrages pour que l’eau ne monte pas jusque là » « Lors de la saison des pluies, le lac devient une ligne fluviale pour les grands bateaux qui ne peuvent pas passer le reste de l’année »

               A l’approche du lac, je suis saisie par la couleur de l’eau,   elle est si sale ! logique, car le lac en retrouvant son niveau normal, charrie le sol de cette terre qu’il a recouvert quelques semaines auparavant.  An arrivant au quai,   malgré la singulière beauté des lieux,  une petite déception m’envahit, je trouve que celui-ci à perdu une partie de son charme, j’aurais aimé y voir plein de petites barques colorées, prêtes à me tendre les bras, hors je  fais face à une noria de grands bateaux à étages qui n’attendent que le touriste, très jolis cependant avec leur coloris bleu-ciel. Pour accéder à l’un d’eux, j’emprunte un escalier moderne, sous mes pieds des marches métalliques, au-dessus de ma tête, un toit recouvert de feuilles de palmiers, dommage pour l’authenticité, mais toutefois un bien pour la sécurité !

              Il est cependant vrai que ça ne m’aurait pas dérangée d’emprunter un escalier de terre et de faire cette promenade dans la petite barque de ces locaux, au lieu de prendre place à bord de cet impersonnel bateau, certes confortable je ne le nie pas !  entre l’emplacement situé au ras de l’eau et celui de l’étage, on a de l’espace.


    


               Toujours dotée de mon oreillette, j’écoute Bunthorn et en apprend ainsi beaucoup sur ce lac.  A présent, après être passé  à coté d’une jolie église catholique blanche et bleue, le bateau longe les rivages,  sur ceux-ci j’aperçois beaucoup de maisons sur pilotis, les habitants préférant probablement diversifier leurs productions.

               Une maison sur pilotis ne flotte pas, elle est ancrée dans la terre, et construite à une hauteur d’environ 7 à 8m mètres de haut, il est alors possible d’évaluer approximativement, au moment présent le niveau de l’eau.

               Occupée à scruter les berges, je ne vois pas surgir ces petites barques venues de je ne sais où ! celles-ci menées par la mère de famille ou encore le grand frère, tour à tour se collent au bateau, Parfois debout dans l’embarcation, un python plus long qu’eux autour du cou, de tout jeunes gamins nous haranguent dans l’espoir sans doute d’obtenir de l’argent, peut-être contre une photo, pourquoi pas ! Je suis à cet instant à l’étage et ne regrette pas mon choix, quoique mes compagnons me diront plus tard « ne pas avoir été trop importunés »  Ce genre de reptile est très présent dans le lac, il n’y a qu’à le… pêcher !  en dehors d’être un animal domestique qu’on exhibe, il sert aussi de nourriture aux … crocodiles.

              Cette intrusion a certes ajouté une touche de piment à  la balade, mais il est tout de même déplorable de voir de  si jeunes enfants ainsi utilisés, et ce par leurs propres parents, pour ramener de l’argent à la maison, bien sûr le python n’a pas la réputation d’être vénéneux, mais n’étouffe-t-il pas sa proie en cas de danger, belle inconscience !  Quel âge donnez-vous à ce petit ce bout de chou dans le plus simple appareil ?

    

             Les barques et leurs charmants occupants  sans doute découragés par ces radins de touristes, font demi-tour.  Si jusqu’alors nous longions la berge avec les maisons des pêcheurs sur pilotis, nous arrivons maintenant à proximité des maisons flottantes, celles-ci sont équipées de flotteurs, parfois ce sont de simples bidons, certaines sont reliées entres-elles par des pieux enfoncés dans l’eau. Conçu ainsi, le hameau ne risque pas d’être inondé.

        « Ce village compte 4000 habitants,  avec une école, un dispensaire, une église, les maisons de cette communauté  peuvent se déplacer  jusqu’à onze fois par an pour chercher des eaux plus profondes » « Tenez, regardez sur votre gauche, c’est un village musulman avec sa mosquée »

           Je regrette qu’à cause probablement de sa taille, le bateau navigue loin (trop loin…)  de ces habitations, j’aurais aimé aller tout près des maisons, voir les gens vaquer à leurs occupations quotidiennes, aller en barque de l’une à l’autre, les enfants dans des bassines… mais pour cela, il aurait fallu de petites embarcations, comme celles que j’ai emprunté  lors de la découverte des villages flottants du lac d’Inlé au Myanmar, (pirogues de 6 personnes) et je vous assure que j’en garde un tout autre souvenir ! bien dommage pour Tonlé Sap sacrifié au profit d’un tourisme de masse.

           « Sous les maisons, vous pouvez voir de petits élevages de poissons, qui soit nourriront les  habitants, soit seront vendus plus tard. La population qui vit du lac est estimée à 6 millions, ceux-ci consomment  chacun 80 kilos de poissons par an. Les locaux pêchent la crevette, dans ce lac d’eau douce elles sont très petites,  aussi pour les attraper, le pécheur pose sur l’eau des branches flottantes, qui cachent de petites carrelets »  et plouf ! la crevette tombe dans le  piège.

            Et l’on arrive à proximité d’un grand bâtiment flottant au toit typique, imposant celui-ci est garni un peu partout de potées de plantes vertes, c’est un îlot de verdure, nous y accostons.

           J’aperçois à travers un grillage des crocodiles, ceux-ci enfermés dans des cages grillagées, nagent dans l’eau du lac, tandis que d’autres se prélassent sur un plancher. Ici le crocodile est devenu un juteux fonds de commerce, cet animal  est à priori pas trop difficile à nourrir, puisqu’il déguste entres-autres les serpents péchés dans le lac, sa peau est transformée en sacs à main, porte-monnaie, sa viande nourrit la population locale. Prenant conscience de ce fort potentiel, les fermes d’élevage ont poussé sur le lac Tonlé Sap, comme des champignons, au détriment du crocodile sauvage qui essaie de ne pas se faire prendre dans les filets.

            Pourvu que le plancher ne s’effondre pas sous mes pieds, quoique n’étant pas un python, je n’ai pas trop envie de leur servir de festin !

           Les habitants ont fait de cette bâtisse un chouette endroit où il est possible de se restaurer, d’acheter quelques bricoles  (porte-monnaie, sacs) en peau de crocodiles, il va de soi !

     

           Et nous repartons, profitons une dernière fois du sympathique spectacle de ces maisons flottantes, des rivages bordés de maisons sur pilotis, des forêts inondées, des bateaux colorés que nous croisons….

         …..du pêcheur dans sa barque, des enfants… je retrouve mes tas de bois et près du quai, un joli alignement des bateaux.


 

 

 

 

  


            Et nous reprenons la route vers Siem Reap, celle-ci est bordée de nombreuses rizières. Puis Than nous amène à un de ces restaurants de la ville qui doit nous faire découvrir les danses traditionnelles khmères, ça sera au « Amazon Angkor » Je m’attendais à un petit établissement sympa d’une cinquantaine de places, woualoo !.....

        …….devant moi je vois  une salle immense avec une quarantaine de tables qui font face à la scène, la salle est prévue recevoir 300 personnes. Il y en aura forcément qui ne verront pas grand chose, j’en fais hélas partie.... écartée des groupes d’amis constitués je me retrouve face à la scène et en bout de table…  

         Le repas est servi sous la forme d’un gigantesque buffet, c’est très bon et il y a du choix, 40 plats dit la brochure, mais lorsque le spectacle commence, je préfère laisser ce délicieux festin pour aller me positionner devant un poteau, le moins loin possible de la scène pour pouvoir filmer en toute tranquillité. Rassurez-vous,  mon dessert a très bien supporté d’attendre l’entracte.


Danses traditionnelles khmères

             Un petit mot sur ces danses, dites Apsaras.

             Ces danses traditionnelles cambodgiennes existent depuis un millénaire, elles sont apparues, lors de l’apogée d’Angkor, sous le règne du roi Jayavarman ll  ce n’était alors pas moins de 3 000 danseuses qui distrayaient  ainsi le roi  et sa cour. Ces Apsaras comptaient beaucoup pour ces souverains, si l’on en croit le nombre important de ces danseuses gravées dans les murs des  temples d’Angkor. Elles ont pour origine les légendes mythologiques,  les Apsaras étaient des esprits féminins dotées d’une beauté surnaturelle, ces jeunes nymphes gracieuses, douées pour la danse,  représentaient l’eau et les nuages. En tant que messagères de la paix, les Apsaras, au pouvoir incomparable, utilisaient souvent leurs danses et leur beauté pour séduire ou piéger ceux qui menaçaient la paix ou le pouvoir du roi des dieux

            La danse Apsara avait presque disparu pendant la période des Khmers rouges (1975-1979)  Aujourd’hui, présentée dans les hôtels, les théâtres, cette danse est devenue une coutume pour accueillir le visiteur de passage.  Depuis 2003, l’UNESCO a reconnu la danse d'Apsara en tant que chef-d'œuvre du patrimoine oral et immatériel de l'humanité.

            Les danseuses portent de superbes costumes traditionnels, la tête est parée d’une coiffe brodée aux mille éclats. Elles effectuent leurs chorégraphies, dos cambré,  genoux pliés, mains courbés, pieds nus et orteils redressés, le talon touchant en premier le sol.

            Si pour nous occidentaux, on n’y voit là qu’un simple gestuel des doigts, sachez que chaque position de la main représente une scène de la vie dans la nature : une tige, une fleur éclose, un bourgeon, un fruit, une feuille… (voir photo ci-contre) c’est ainsi qu’à travers ces lents mouvements stylisés, les danseuses Asparas racontent une histoire. Nul doute  que des années de répétition  doivent être nécessaires pour arriver à un tel niveau.

            Alors chut…. Le moment est venu de faire communion avec ces 40 jeunes gens qui vont pendant une heure nous présenter trois danses Apsaras et deux de la vie quotidienne.  

                  * Danse de souhaits et de bienvenue. Les apsaras présentaient leurs meilleurs vœux au souverain et à ses hôtes. Aujourd’hui, c’est par une pluie de pétales que les danseuses vous apportent à jamais bonheur et prospérité.

             * Danse de noix de coco.  Cette danse populaire accompagne les cérémonies nuptiales. Rythmée, ponctuée de cris et de claquements de noix de coco, elle exprime la joie de vivre.

               * Danse de Mekhala. Symbole de la victoire du bien sur le mal. Moni Mekhala,  déesse des eaux qui lance des éclairs, triomphe sur le démon Ream Eysaur, dont la hache produit le tonnerre. Ces deux personnages métaphoriques illustrent la victoire des pluies bienfaitrices sur la saison sèche et orageuse.

             * Danse des pêcheurs. Cette danse rurale de divertissement décrit, en les exagérant, les attitudes garçons et des filles dans leur approche amoureuse. Elle nous montre un garçon tenace et malicieux, cherchant à séduire une jeune fille sérieuse et timide.

                  * Ballet des apsaras. Ce ballet de ces Apsaras, mi-femmes, mi-déesses participait aux cérémonies d’offrandes et aux fêtes palatines de l’époque angkorienne.   Elles évoluent par des déplacements circulaires, des mouvements calmes et souples.

            Ci-dessous un montage de 10 minutes, je vous invite à vous asseoir confortablement, et d’en prendre plaisir.

VIDEO EN ATTENTE

           Ces jeunes danseurs sont accompagnés par quatre musiciens qui jouent avec des instruments traditionnels :

                 * Les tambours Samphor (tambour horizontal à deux peaux qui donne le rythme) et Skor Thom (petites cymbales de bronze au son très aigu)

                 * Le Kong Thom, percussion mélodique, constituée d’une suite de petits gongs buldés en cuivre, disposés horizontalement sur un cadre circulaire en rotin, au milieu duquel s’assit le musicien.

               * Le xylophone Roneat EK, fait de lames de bambous ou de teck,  disposées sur une caisse de résonance en forme de barque

                  * Le Sralai, un hautbois, instrument à vent

              Ce spectacle est magnifique, ces jeunes femmes ont un sens inné du petit détail,  leurs gestes sont minutieux, bravo à vous,  quoique les danses ne sont pas entraînantes…j’ai adoré ! Ce qui m’a choqué, mais je pense c’est la coutume dans les pays asiatiques, l’ayant déjà vécu, il y a deux ans, en Chine, les spectateurs n’attendent même pas la fin du spectacle, ils envahissent la scène pour se prendre en selfie avec les danseuses.

             Après cette journée bien remplie, je rejoins l’hôtel pour ma dernière nuit au Cambodge, car hélas, tout a une fin.

             Le voyage n’en est pas fini pour autant, demain matin, il est prévu de visiter un centre artisanal puis de se rendre à Poket, la frontière terrestre entre le Cambodge et la Thaïlande, et je puis vous assurer que de franchir celle-ci a plutôt été épique.

            Alors, ne manquez pas de me suivre dans cette dernière page.

            Bonne nuit  et à demain ! 
                                                                                

        Le centre artisanal d'Angkor