ð Suite du Vendredi 23 Janvier 2009.  (Point N° 14 carte itinéraire)   

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              Après avoir visité le cœur historique de Pretoria, nous nous rendons à Soweto, banlieue noire située à 15 kms au sud-ouest de Johannesbourg, où nous déjeunerons dans un shebeen. En cours de route, nous subissons un orage d’une rare violence, l’eau qui dévale recouvre la route sur plusieurs centimètres, les voitures chassent, ce court orage provoque un bouchon à la périphérie de Johannesbourg, les voitures roulent au pas. Nous arriverons pour déjeuner vers 14 heures.

 

       Nous faisons la connaissance de Snothile, une jeune femme qui connaît ce quartier par cœur et sera notre guide pour la visite de Soweto.

       Le déjeuner se passe chez « Wandie’s » un shebeen en plein cœur de Soweto, mais qu’est-ce qu’un shebeen ?

             E C’était un endroit ou des boissons alcooliques étaient vendues sans autorisation à une époque où le gouvernement de ségrégation refusait aux africains le droit de consommer de la boisson alcoolisée. En grand nombre dans Soweto, ils sont légaux aujourd’hui, même devenus des lieux très prisés de rendez-vous. Wandie, le propriétaire a commencé son activité dans la clandestinité en ouvrant son shebeen en 1981, aujourd’hui, transformé et agrandi,  il est l’un des plus prospères de Soweto. Sur les murs, quelques cartes de visites et autographes de nombreuses célébrités de passage, comme Bill Clinton par exemple. Il accueille 300 couverts par jour, beaucoup de touristes étrangers, et emploie 20 salariés .

 

      Les origines de Soweto: (SOuth WEstern TOwnship) En 1931, on construit à Orlando des maisonnettes minuscules, identiques, sans commodités ni prestations, le quartier est  près des mines d’or où les noirs travailleront  toute leur vie, pour enrichir l’étranger blanc. En 1954, selon les nouvelles lois de l’apartheid, 60000 ouvriers sont expulsés de chez eux, pour les « parquer » on construit en périphérie des constructions en tôles ondulées, les bidonvilles sont maintenant installés à Soweto... La situation économique est catastrophique, les services publics deviennent alors incapables de subvenir à la demande en électricité et en eau potable. Quartier constitué aujourd’hui de 67 banlieues noires, certaines très pauvres avec encore quelques bidonvilles, mais aussi certaines très aisées, ce fut l’endroit ou la révolte contre l’apartheid commença.

 

                  Soweto immense, s’étend sur 140 km² avec une population de plusieurs millions d’habitants.  Depuis 10 ans, le gouvernement a décidé de raser les townships et d’offrir une maison à chaque personne recensée, aussi  le quartier se transforme peu à peu avec la construction de petites maisons en briques, avec raccordements à l’eau, à l’électricité et au téléphone. Nous en faisons un tour panoramique, sillonnant à travers ces rues sans toutefois pénétrer dans les bidonvilles, par décence mais aussi et surtout par sécurité ! les enfants heureux de notre présence, nous font de grands bonjours. C’est dans les collines des quartiers « chics » que vit toujours l’ex femme de Nelson Mandela : Winnie, maison importante construite avant son divorce, grâce aux dons de Fidel Castro, Kadhafi, Jane Fonda, et Clint Eastwood, d’après Snothile !

 

                 Nous passons à proximité d’anciennes centrales à charbon recouvertes de peintures murales colorées, on peut y apercevoir dessiné, Nelson Mandela.

 

     

 

             Dans la rue Vilkazi, se trouve sa maison ou il avait vécu de 1946 à 1961 au début de sa carrière d’avocat, aujourd’hui transformée en musée. Elle était à notre passage en complète rénovation et cachée par des palissades. Dans cette même rue, à 50 mètres, vit épisodiquement Desmond Tutu, archevêque anglican sud-africain, ce qui fait de cette rue, la seule au monde où vécut deux prix Nobel de la Paix, Nelson Mandela en 1993 et Desmond Tutu en 1984.

 

 

                      E Les émeutes de Soweto : Elles firent entrer le township dans l’actualité internationale. Remontons 50 ans en arrière... pour comprendre. En 1955, s’y tint le congrès historique de l’ANC qui vit l’adoption de la Freedom Charter (charte de la liberté). Les autorités considèrent cette adoption comme un geste de sédition et de trahison. En 1959-1960, Soweto continue de grossir avec l’afflux des populations expulsées de Johannesbourg, quartiers qui furent pour certains ensuite rasés.   1964, la cachette des membres de l’ACN est découverte, le gouvernement arrête et inculpe 156 militants (dont Nelson Mandela). Soweto sera alors régulièrement le terrain d ‘affrontements politiques au sein de la résistance anti-apartheid.



 

           Le 16 Juin 1976, une manifestation d’étudiants éclata, lorsque le gouvernement voulut rendre obligatoire l’afrikaans (la langue de l’oppresseur !) à l’école, les lycéens protestaient aussi contre les inégalités du système éducatif, qui maintenaient les Noirs dans la misère avec des conditions de vie sordides, ils réclamaient un enseignement aussi bon que celui prodigué aux Blancs, manifestation à laquelle de nombreux écoliers se joignirent. Les manifestants jetèrent des pierres, la police riposta par un matraquage, des bombes lacrymogènes et fit feu... Le premier tué de ce drame sanglant fut un jeune garçon prénommé Hector Pietersen, 13 ans.

           Quelques jours plus tard, Soweto se soulèvera, il y aura de nombreux morts et blessés. L’impact de la révolte de Soweto dans le monde fut énorme, beaucoup de Blancs d’Afrique du Sud réalisèrent pour la première fois l’ampleur du problème. Ce soulèvement changera le cours de l’histoire sud-africaine, entraînera  la remise en liberté des prisonniers politiques, et beaucoup plus tard, en 1991, la fin de l’Apartheid.

            Après la 1ère  élection démocratique (1994) le 16 Juin sera déclaré « jour de la jeunesse » rendant hommage à cette jeunesse qui lutta contre la ségrégation.

 

 

         Nous nous recueillerons quelques instants devant ce mémorial fait de granit ocre. A l’initiative des jeunes de l’ANC, il fut inauguré le 16 Juin 1992 par le président Nelson Mandela. Il est visible de loin, sur le mémorial est gravé le message suivant « « En la mémoire de Hector Pieterson et tous les jeunes héros et héroïnes de notre lutte qui ont donné leurs vies pour la paix et la démocratie ». Derrière, la mythique photo,  symbole de la brutalité du régime d’apartheid, fut réalisée par le photographe Sam Nzima, elle montrait le corps sans vie d’Hector dans les bras d’un jeune homme, suivi par une jeune fille en pleurs.

 

                 ¯ Les faits : Quand le jeune Hector tombe sous les balles, un écolier de 18 ans, Mbuyisa Makhubo le prend dans ses bras, et la sœur d’Antoinette à ses cotés, va se précipiter vers la voiture de Sam Nzima, photographe de presse, mandaté par son journal « le Word » Sam Nzima  voyant ces enfants paniqués venir à sa rencontre prendra six photos. Craignant que la police ne lui la confisque, il retire aussitôt la pellicule de l’appareil et la cache dans l’une de ses chaussettes, puis ils vont à l’hôpital où Hector sera déclaré mort. Il dira de cette journée qui mettra une fin brutale à sa carrière de journaliste : « C’était juste une manifestation, les étudiants étaient heureux, ils brandissaient des pancartes, pas des armes, les policiers ont fait usage de la force, ils ont commencé à tirer, au hasard  » Le lendemain, la photo est dans tous les journaux britanniques, puis elle fera le tour du monde.  Mbuyisa et Nzima ont ensuite été harcelés et durent se cacher, Mbuyisa aurait, sitôt les émeutes, quitté l’Afrique du Sud, nul ne sait ce qu’il est advenu, quand à Nzima, il connaîtra le harcèlement policier, les pressions et la peur, son journal « The Word » fermera ses portes, les négatifs disparaîtront... Il sera assigné à résidence à Lillydale, son village natal, uniquement accessible par piste, à la frontière du parc Kruger,  ou il ouvre une épicerie. Aujourd’hui âgé de 74 ans, il y vit entouré de sa femme et de ses quatre enfants. Antoinette, la sœur d’Hector travaille au musée.

 

       Nous faisons demi-tour pour rejoindre Pretoria, sur le bord de la route, beaucoup de gens, certainement pas parmi les plus aisés, tentent de vendre fruits et légumes, habits,  ainsi que des chèvres.

 

   

 

 

       Béatrice nous apprend que fin 2007, un noir sud-africain,  Richards Maponya réalisa son rêve vieux de plus de 20 ans : construire un centre commercial à Soweto, celui-ci est immense : 60 000 m² donnant du travail à de nombreux jeunes. Projet soutenu par Nelson Mandela qui coupera le cordon à l’occasion de l’inauguration. Aujourd’hui cet homme d’affaires est très riche et possède une bonne partie de Soweto.

       A la sortie de Soweto, de nombreux terrils, symbole de la richesse passée, ils contiendraient encore un petit peu d’or, 0.1 gramme par tonne.

 

 

               Johannesbourg est le théâtre d’un immense chantier, construction d’un stade, mais aussi d’un train rapide. Le « Gautrain »  devrait voir le jour à l’occasion de la Coupe du Monde de Football, en 2010. Ce chantier colossal réalisé par Bouygues et exploité par notre RATP reliera la capitale économique à la capitale politique, Pretoria. Avec la branche conduisant à l’aéroport, 80 kms de voies, dont 28 kms de tunnels, seront parcourues à 160 km/h, reliant Johannesbourg à Pretoria en 35 mns. Départ les heures de pointes toutes les 10 mns. Quelques chiffres : 2,5 milliards d’€, 93 000 emplois, 6,7 millions de m3 de terre déplacés, 11 viaducs construits....

       Ce train rapide devrait dégorger la trop fréquentée autoroute, sur celle-ci un grillage haut de plusieurs mètres séparent les deux tabliers, beaucoup trop d’accidents mortels parmi les piétons nous confie Béatrice, ce grillage devrait leur empêcher le franchissement de cette route.

 

     Voici Pretoria et ses gratte-ciels, ainsi que l’Université qui est la plus importante d’Afrique du Sud.

 

    

 

 

       Voila, la journée s’achève, j’espère que ce reportage de notre voyage en Afrique du Sud vous aura plu, mais notre séjour n’est pas terminé pour autant. Après dîner, nous refermons les valises, quittons ce pays momentanément,  pour nous envoler pour Livingstone, capitale de la Zambie, où nous attendent (nous l’espèrons  ) les hippopotames se baignant dans le fleuve Zambèze, et les magnifiques chutes Victoria.

 

 De Durban à Johannesbourg, nous avons effectué environ 1800 kms.

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