Récit en version imprimable

* Samedi 4 Février (suite) C’est avec un Airbus A320, toujours de la compagnie LAN, que nous survolons pendant deux bonnes heures cette extraordinaire région qu’est la Patagonie. Avoir une place à coté du hublot sera, j’en prends conscience à cet instant, mission impossible, seul le premier couple du groupe à se présenter aux comptoirs, en l’occurrence le plus vif……  y arrive, mais avec mon homme qui n’a plus la même vigueur, qui lambine, qui traîne, …. aucune chance !...

Je n’ai donc pas de photos à proposer de ce magnifique paysage vu à 10000 m d’altitude. Je les imagine alors, ces sommets de la Cordillère des Andes, pour les avoir admirés lors d’un voyage au Pérou,  l’avion les frôlait, semblait jouer avec eux, quoique à cette latitude, ils sont déjà beaucoup moins élevés, la plus haute cime de Patagonie ne ferait que !…. 4058 m.

Et c’est parti pour un énième paquet de cacahuètes grillées, accompagnés de ses deux chocolats, fort bons d’ailleurs, mais ça commence à devenir rasoir !... A l’arrivée sur  Punta Arenas, nous survolons le détroit de Magellan, pour atteindre la piste l’avion doit entamer une large courbe au-dessus de l’eau, superbe panorama que j’entre-aperçois. (point N° 9 carte itinéraire)

 Vers 16 heures, les valises de nouveau récupérées, nous faisons la connaissance de Lenin et d’Alvarro, ainsi que de notre nouveau  compagnon de route, qui n’a pas de nom, lui ! ça sera donc « le Mercedès »

Lenin nous annonce tout de go un changement dans l’ordre du programme : l’inversement des hôtels : aller d’abord à Puerto-Natales. Du fait de l’horaire très matinal du vol du retour pour Santiago, il préfère faire les 250 kms qui nous séparent de cette ville aujourd’hui quitte à y arriver assez tard, et dormir la veille du vol à Punta-Arenas à proximité de l’aéroport. Dans cette région de bout du monde, la fréquence des avions, même les régionaux n’est pas très importante. Sans cette décision, à quelle heure aurions dû nous lever ? peut-être même ne pas se coucher du tout ! Bravo Lénin qui dans ce cas a su faire preuve d’une initiative fort judicieuse.

Première impression en foulant cette terre de bout du monde, rien …… si ce n’est qu’il ne fait pas très chaud, dans les 12° à 13°, le ciel y est nuageux. Pour l’instant, nous n’en pensons rien, on va se faire une opinion pendant les trois jours à venir.  Le Chili est divisé en 12 régions administratives allant du Nord au Sud, nous sommes dans  vous l’aurez deviné…… la 12ème : la Patagonie : région de Magallanes et Tierra del Fuego, bien près de l’Antarctique….

Lenin (père de quatre enfants dont le plus agé a 21 ans) est, nous le constaterons plus tard en le connaissant mieux, ce qu’on pourrait appeler quelqu’un de « carré » sachant très bien ce qu’il veut, ce qu’il doit faire et quand il doit le faire ! ses informations sont données d’une voie forte et assurée, il fait preuve d’autorité, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Il y a fort à parier que pour l’excursion aux manchots de l’île Chiloé, il se serait rallié sans hésiter à l’écrasante majorité (ce qui d’ailleurs se fait… et aurait dû se faire !….) son curieux sens de pince-sans-rire, disant parfois l’inverse de ce qu’il pense nous déroute un moment, il aimait « en rajouter » à ceux qui craignaient le bateau, par exemple !…… Mais au bout quelques heures, on t’avait dévoilé petit malin !

« D’où viens tu ? D’où vient ta connaissance de notre langue ? »  « Je viens de France, j’y ai vécu 14 ans » « Toi aussi ! » Je ne veux pas m’embrouiller dans mes notes  bien souvent écrites de mémoire après une conversation…. mais il me semble que son père vivait en France, qu’il étudiera chez les « curés » 

Ce qui me frappera tout de même, Lenin est notre quatrième guide, il en sera de même plus tard pour Flora, à part Carlos-Enrique à Santiago qui a étudié le français en Université, personne n’a jamais parlé de diplôme quelconque, ou de formation spécifique comme « guide touristique » par exemple. Je crois que leur seule connaissance de la langue française a été le sésame pour être guide. Lenin ne tutoie pas mais nous appelle par nos prénoms, nous trouvons cette attitude qui nous met à l’aise très sympathique, lorsque lors d’un dîner nous lui en faisons la remarque, il nous dira que pour lui c’est une façon d’être plus proche de « ses clients »

Tout en effectuant les présentations, le Mercédès remonte la Ruta 9, la « carrera Austral » en direction de Puerto Natales. A 65 kms de l’aéroport, nous approchons de Seno (fjord) Otway, voie d’eau naturelle  reliée à l’Océan Pacifique par le détroit de Magellan. Le temps est toujours nuageux mais sans plus. Dans ce fjord existe une grande variété d’espèces marines, mais notamment une colonie importante de manchots de Magellan. Cette réserve privée est au bout d’une route elle aussi privée, pour y pénétrer, il faut s’acquitter d’un droit de passage, bon investissement pour le propriétaire de cette steppe totalement désertique et asséchée.

 Pingouins, pingouins ! déjà Inti nous en avait touché deux mots, il paraît qu’il n’y a que nous français pour donner ce nom à ces gentils oiseaux, Lenin ne connaît que le « manchot » Une petite recherche m’apprendra que le seul pingouin encore existant et qui vole, contrairement au manchot….est petit et vit dans l’hémisphère Nord, on peut le rencontrer de la Bretagne ……  au Pôle Nord,  aujourd’hui  on en est bien loin !.... C’est un abus de langage, une confusion, et pourtant comment expliquer que le site porte le nom de la « Pingüinera de Seno Otway »

Quelques mots sur cet oiseau bien sympathique.  Visibles sur ce site de Septembre, période où ils font leur nid et se reproduisent, à Mars, date à laquelle les parents et les petits nés en Octobre partent en migration en mer.  Leur taille est d’environ 50 cms, ils ont le dos noir et le ventre blanc, deux bandes noires sous le cou, des pattes palmées avec trois doigts munis de griffes. Bon nageurs, ils peuvent atteindre 24 km/h lorsqu'ils poursuivent une proie et plonger jusqu'à 75 m de profondeur, leur longévité est de 25 à 30 ans.

Nous sommes donc à la période la plus propice pour les admirer, pas loin de 6000 couples disent les guides, ça va faire du monde !

Lenin  nous recommande de bien nous couvrir, aide même certains à tirer les liens des capuches, l’endroit est très venteux, tu parles ! on voit bien qu’il ne connaît pas la pointe du raz !....  Mais c’est qu’il commence à nous faire peur !..... par-dessus son jean, il enfile un pantalon de pluie,  recouvre son crane d’un bonnet, crane qui craindrait plutôt les coups de soleil, s’emmitoufle pire que pour accéder au sommet de l’Annapurna…..

Je savoure mon bonheur, une petite balade agréable sur un sentier en planches d’environ 800 mètres avant d’arriver à eux.  Longeant ce sentier qui mène à la mer, un grillage qui empêche l’humain d’accéder à l’espace protégé, mais aussi les animaux comme ces chiens égarés qui en 2001 ont massacré une centaine d’oiseaux. Une boucle supplémentaire longe la plage, elle  devrait nous donner la possibilité d’en voir beaucoup, beaucoup !

Plus on avance vers la mer, plus ça souffle, lorsqu’ un élément autant  indésirable que surprenant s’invite, à peine arrivés nous sommes littéralement bombardés par une averse de grêle ….. transis, frigorifiés, gelés, c’est devenu quasiment impossible de les observer, encore moins de les photographier :  pas d’essuie-glace sur les lunettes  , les doigts ankylosés, de plus l’appareil photo ne va pas aimer….. Le petit cabanon nous sert d’abri, mais c’est tout ! de celui-ci les manchots sont à peine visibles….

On attend une quinzaine de minutes, mais rien à faire, le ciel est gris de gris, et c’est presque au pas de course que nous réintégrons le parking, où nous arriverons les pantalons trempés, sans avoir même pu faire la petite boucle qui longeait la mer.

Décidément, les déceptions s’ajoutent aux déceptions …. a ce moment là, je suis furax  de ne pas avoir pu voir ceux proposés par Inti à l’île de Chiloé, qu’on approchait grâce à un zodiac (pour rappel, notre guide local avait cédé aux pressions des deux seules personnes qui s'y étaient opposées) il y faisait un temps très correct !...

    

A l’entrée du site, un « centre de visiteurs » avec quelques souvenirs « manchots » un bar et des toilettes. Le local est chauffé, nous reprenons notre souffle.

Il est près de 18h30, reste environ 200 kms à faire d’ici Puerto Natales, c’est certain, on n’y sera pas de bonne heure. Lenin prévient les responsables de l’hôtel pour le dîner.  Sur la route, rencontre avec des nandous, ressemblant à de petites autruches grises, le soleil refait de timides apparitions, nous sommes vraiment tombés au mauvais moment…

La fatigue commence à se ressentir, nous avalerons cette route australe, la Ruta 9, finalement sans grand intérêt, bordée de part et d’autres par d’immenses étendues de steppe patagonne.  Régulièrement disséminées au milieu de cette région désertique, fortement balayée par les vents forts, on aperçoit des vastes estancias délimitées par des panneaux en bois ouvragés.

   La Patagonie figure parmi les régions les plus vierges de la Terre, ici la Cordillère s'effrite en milliers d'îles, de lacs, de canaux, de fjords, de glaciers, de montagnes, de steppes...)

 

21 H passés, l’hôtel Saltos del Paine nous accueille.     

Dîner rapide et au dodo. Demain nous naviguerons sur le fjord Ultima Esperanza, à la découverte des glaciers Serrano et Balmaceda

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