Angkhor Thom

                          rond006 Samedi 14 Décembre 2019

            Bonjour…    Xin Chào…    

           Ce matin je me suis levée avec grand enthousiasme, pensez donc ! je suis à deux doigts de découvrir ces temples si connus, tout comme le font près de 5 millions de visiteurs par an, destination qui avec la Baie d’Halong m’ont fait privilégier ce circuit. Ceux-ci se trouvent à environ 10 kms au Nord de Phnom-Penh (point N° 20 carte itinéraire)

         C’est avec le laissez-passer passé  autour du cou, ça va en faire tout ça, des brins à s’emmêler les uns avec les autres ! : appareil photo, audiophone, et maintenant ce billet qu’il va falloir garder durant les deux prochains jours, que je m’apprête à découvrir ces splendeurs.

         Ce ticket que nous avons fait réaliser hier soir, près du Manorama Museum est personnel, il porte ma photo et permet de visiter tous les temples du Parc archéologique.  Il est vérifié et poinçonné à chaque entrée,  donc attention à ne pas le perdre ! « Des petits trous, encore des petits trous, toujours des petits trous !… »

              Au dos de ce sésame, quelques consignes à respecter, Angkor étant un centre spirituel, il est interdit d’y fumer, de jeter des détritus et de faire du bruit, ne pas y porter de vêtements trop légers, tels que les shorts ou robes qui montrent les genoux, ou les tee-shirts qui exposent les épaules.

             Au cours de cette visite, j’ai abandonné l’idée d’enregistrer, cette fonction demandant une proximité immédiate avec le guide, le but de l’audiophone étant justement de parler très bas pour ne pas gêner quiconque, aussi je préfère mitrailler… C’est donc avec les notes récupérées sur mon guide spécialisé sur les temples d’Angkor (de Michel Petrotchenko) et mes photos personnelles, que je réalise cette page.

             Ces différents temples sont disséminés sur un parc de 13 kms sur 7 kms entouré d’une enceinte,  la circulation touristique y est interdite, aussi c’est une navette, où nous nous sommes entassés tant bien que mal, qui nous mène à l’entrée Est d’Anghor Thom. Sinon si vous n’êtes que quatre, voir moins… des sortes de calèches tractées par une moto sont disponibles.

           Bunthorn  a noué son krama multi-usages, à l’extrémité d’un grand parapluie, bien pratique ce signe original de ralliement !

           Beaucoup de temples sont en restauration avec des étais qui soutiennent les portes d’entrée, régulièrement des panneaux nous incitent à « ne pas toucher » Sans doute par précaution et aussi pour empêcher le fougueux « fou de photos » de pénétrer plus avant, un cordon empêche d’approcher.

              Quelques lignes d’histoire :

             Angkor désigne le vaste domaine, situé au nord du lac Tonlé Sap, où les rois khmères régnèrent du 9ème siècle jusqu’au début du 15ème siècle. Jashovarman ll couronné en 802, y établit sa capitale, mais c’est surtout au 12ème siècle sous Jayavarman Vll, couronné en 1182, qu’on utilisa le terme « empire » avec la construction des majestueux temples que l’on admire encore aujourd’hui, mais aussi de 102 hôpitaux, de routes, des 121 ponts de latérite établis le long des routes à l’intention des voyageurs. Ce roi entoura sa cité de remparts afin de la protéger contre les attaques de ses voisins Chams.
           Jayavarman Vll  en construisant Ta Prohm, temple destiné à accueillir son dieu,  a voulu rendre  hommage à ses parents, par cette action, il pensait acquérir des mérites personnels pour sa vie future. Ayant construit beaucoup d’autres sanctuaires, l’héritage laissé par ce roi est monumental.

              Au 12ème siècle, la religion officielle des rois Kmers est l’hindouisme, on idole Brahma le créateur, Shiva qui insuffle son énergie au monde nouveau, Vishnu celui qui protège, préserve ou rétablit l’harmonie du monde, le taureau blanc Nandin, mais aussi des lingas du bouddhisme: Mahayana, Vajrapani, Tantrisme…. Fait étrange, les statues des bouddhas furent plus tard pratiquement toutes détruites, un sacrilège dont les historiens n’arrivent toujours pas à établir les auteurs de ces méfaits.

              Avec l’arrêt de la construction de ces vastes temples de pierre, le déclin  du royaume commença presque aussitôt après le décès de Jayavarman Vll, peut-être que ces ambitieux programmes de construction ont épuisé les ressources du royaume, ou encore que l’avènement du bouddhisme Thevada a affaibli le pouvoir absolu du roi. L’arrivée des Siamois au 13ème et 14ème siècle a  peut-être été aussi un des facteurs déterminants, car ces derniers privèrent Angkor des richesses que sa longue domination du bassin du Ménam lui avait procurées (notamment des esclaves).
           Toutefois la cité va demeurer la capitale du royaume jusqu’en 1431, mais vint un temps ou il n’y eut plus d’autre choix que de la déplacer, c’est alors que les rois khmères abandonnèrent ces temples qui tombèrent dans l’oubli.

         Tout savoir sur leur construction :

           Ce sont les carrières de Phniom Kulen qui fournissaient le grès, roche sédimentaire assez tendre et facile à travailler et sculpter. Mais pour les murs d’enceinte et les édifices annexes, on utilisait plutôt de la latérite (argile rouge, humide et tendre dans le sol, qui séchée au soleil devient aussi dure que la pierre, elle peut facilement être découpée en blocs)

          Ces anciennes carrières se trouvaient à 40 kms des temples. Comment ces pierres ont-elles pu être acheminées ? amenées sur des radeaux de bambou qui descendaient le courant, tirées par des éléphants ? Un m3 de grès pèse plus de 2 tonnes, les monolithes utilisés pour sculpter les statues de divinités de grande taille, représentaient un volume de plusieurs m3. Le bois, quoique plutôt utilisé dans le palais royal, était peu présent, quelquefois des pavillons et des galeries étaient ajoutés aux temples de pierre, mais l’humidité et les termites les détruisirent.

          Au temps de la splendeur d’Angkor, l’aspect extérieur des temples était très séduisant. Au 10ème les sanctuaires alors en brique  étaient entièrement recouvert d’une couche de stuc finement modelée, ils étaient sans doute même colorés, avec principalement du rouge. Une colle à base de végétaux liait les briques entre elles, mais plus tard, dans les constructions en pierre, celles-ci ajustées à la perfection étaient simplement posées les unes sur les autres.

          Des prêtres et assistants y accomplissaient les rituels quotidiens en faveur  des divinités. Les temples détenaient des trésors : soie chinoise pour protéger les pieds des dieux des moustiques, pierres précieuses, timbales, bougies, métaux précieux,  voiles de flanelle route et blanche pour vêtir les dieux, tasses et ustensiles en or, perles……….

Ta Prohm

           Dans l’allée qui mène à Ta Prhom, j’aperçois une troupe de musiciens, j’éprouve une  certaine gêne à les photographier mais le sourire de l’un d’eux m’encourage, ces hommes  handicapés ont perdu à cause de l’agent Orange, soit un bras, soit une jambe.

             La vision des temples d’Angkor que j’en ai à ce moment là est pour moi surprenante ! je ne pensais trouver que deux ou trois temples bien conservés, du moins convenablement restaurés, hors je constate que ce sont d’innombrables morceaux à terre,  mais surtout une multitude de petits édifices croulant pour la plupart sous la végétation, comme :

            ce figuier étrangleur qui fut fatal à ce temple. - Le figuier étrangleur démarre du sommet d’autres arbres ou d’un sanctuaire, à partir de graines transportées par les oiseaux. De ce point élevé, de fines racines rejoindront le sol et se développeront progressivement pour finalement « étrangler » le temple

              La nature a pris sa revanche sur l’ahurissant ouvrage ordonné par ces rois, car ces arbres aux minuscules racines infiltrées entre les pierres, en continuant de pousser, ont fait d’importants dégâts, Le combat est devenu inégal entre celle ci et les temples, mis KO ces derniers doivent dégager… L’action de la pluie et du soleil, les excréments des colonies de chauves-souris qui, lorsqu’ils étaient abandonnés, les ont envahis, ont aussi contribué à les dégrader.

          Ces arbres aux racines spectaculaires constituent, certes, un attrait majeur, mais certains devront être coupés afin de prévenir les dommages que leur chute, due au vieillissement, causeraient au temple.

           La « grande ville royale » fut fondée par le roi Jayavarman Vll en 1186 après l’incursion cham de 1177. Ta Prohm était un monastère et une université bouddhique, on y trouve alignées 93 cellules de moines qui font face aux douves, un mur bas en latérite séparait le quartier des moines de l’espace sacré du temple.

          Plusieurs sanctuaires furent ajoutés à l’est, ceux-ci abritaient des centaines de divinités, les gens ordinaires n’avaient probablement pas le droit d’accéder à la zone centrale des temples.

            Ta Prohm était le centre monastique le plus important du royaume, ayant autorité sur le réseau des hôpitaux. A son zénith plus de 3000 villages étaient affectés à son entretien et plus de 12000 personnes vivaient dans l’enceinte, dont 18 grands prêtres et 600 danseuses.


              Depuis la porte Est, en empruntant des chemins de terre battue,  longer ces ruines est agréable, car la nombreuse végétation offre un oasis de verdure, j’y vois quelques édifices restaurés, passe devant le quartier des moines, avec ses fenêtres encadrées  chacune de devatas - un devata est une sculpture debout une fleur à la main qui, contrairement au souriant aspara, arbore plutôt un air hautain -

             J’aperçois dans l’enceinte du palais royal beaucoup de « spungs » arbre appelé familièrement fromager, ce nom fut donné par les premiers colons français, pour lesquels les racines semblaient « couler » sur les monuments, et que serait-un français sans fromage  !... Avec leurs immenses racines, ces  impressionnants « stungs » écrasent les toits des temples, nous coupent même le chemin, certaines énormes, se faufilent à travers les galeries.

    

  
           La porte du temple que je découvre maintenant, présente à elle seule toutes les caractéristiques propres : un linteau (pierre sculptée représentant souvent un dieu, située au-dessus des portes) un fronton (couronnement de forme ogivale situé au-dessus du linteau où figurent des scènes mythologiques). Il faut savoir que les linteaux et les frontons n’étaient pas sculptés dans des ateliers, mais directement sur place, par des sculpteurs juchés sur des échafaudages, tâche très difficile et très délicate. J’y vois aussi de belles colonnettes, celles-ci décorées de motifs végétaux soutiennent le linteau.

             Cette sculpture ci-dessous, montre un roi dans un palais, avec les gens de cour qui semblent être heureux. (des asparas)

             La porte Ouest par laquelle je sors de Ta Prhom est située comme ses consœurs sur les axes cardinaux. De part sa grande taille, ce bloc de pierre montrant sur ses quatre faces  un visage géant à l’impression sereine et énigmatique m’interpelle, serait-ce celui du roi  Jayavarman Vll ?

 

                

          Après avoir repris la navette, j’arrive sur une esplanade à plusieurs niveaux, accessibles grâce à des escaliers gardés par des nagas, ce sont :  

          Les terrasses royales – La terrasse des éléphants et celle du Roi Lépreux-  s’étendent sur environ 400m de long et 15 m de large. Le roi Jayavarman Vll devaient suivre les défilés militaires et autres parades, confortablement installés dans les pavillons de bois richement décorés qui s’élevaient autrefois au centre de celles-ci. C’est probablement également à cet endroit que le roi apparaissait chaque jour pour écouter les doléances de ses sujets.

                ì Terrasse des éléphants. En façade de ce long mur couvert de bas reliefs ayant pour thème principal la guerre, j’y vois trois éléphants qui cueillent des fleurs de lotus avec leurs trompes. Autour se trouvent pêle-mêle des sculptures d’apsaras (personnages souriants qui dansent) et des guerriers sabres au poing, ainsi que des tigres, des lions, des serpents, des oies sacrées…

            Au sommet de cette terrasse s’élève une grande fleur de lotus stylisée, ce petit belvédère m’offre une vue panoramique sur cette terrasse, gardée par des lions et des Garudas, un être mystique de la mythologie hindouiste et bouddhiste. Un petit peu au Nord, voici la :

               ì Terrasse des lépreux.  Sa façade de grès d'environ 25 m de côté et 6 m de haut formant grossièrement un « U » est entièrement ornée de bas-reliefs couvert de personnages illustrant des créatures du monde souterrain, divinités,  démons, rois, princes armés de massues ou de sabres, princesses parées de fleurs de lotus, nagas, devatas, apsaras…

  

              Les historiens pensent que ce lieu pourrait être un lieu de crémation pour les rois. Les lépreux étaient nombreux à Angkor, mais la population ne leur manifestait pas d’hostilité, le roi lui-même n’était-il pas malade !

             La statue qui donne son nom à la terrasse date du 15ème siècle, elle représente probablement Yama, le dieu hindouiste de la Mort, celle que je vois est une copie, l’original est conservé en lieu sur au Musée national à Phnom Penh.

            Je quitte à présent ces splendides terrasses pour me rendre au Palais royal, l’entrée que Bunthorn emprunte me projette devant le bassin royal, un plan d’eau de 150 mètres de long, pavé de blocs de latérite, ce bassin était-il un lieu de spectacles nautiques ?

            Le domaine du palais Royal est délimité par une enceinte en latérite de 600 mètres de long et 250 m de large. Outre le bassin royal, il comporte le Phiméanakas, temple hindouiste. Au fond, des  fondations laissent supposer qu’ici devaient se tenir les quartiers des serviteurs et des concubines, des milliers paraît-il !

           Projetons nous près de 1000 ans en arrière, imaginons cette vaste zone grouillante de vie, occupée par de nombreux bâtiments et pavillons construits avec des bois précieux. Outre le palais du roi qui devait être somptueux, il devait y avoir des bâtisses pour les prêtres, la garnison, les concubines. Cette splendeur architecturale a disparu depuis longtemps, victimes des incendies allumés par des envahisseurs, des éléments, ou encore des termites après l’abandon de la cité par ses monarques. Alors oui imaginons !..

               ì Le Phiménanakas, signifiant « palais céleste » en kmer est un temple hindouiste qui a été bâti sous le règne de Rajendravarman ll, au milieu du 10ème siècle puis agrandi par Suryavarman 1er, 1ère moitié du 11ème siècle, c’est dire qu’il n’est pas jeune ! Sa base mesure 35 m sur 28 m, les quatre escaliers qui mènent à la terrasse supérieure (30x23m) sont gardés par des lions assis, aux angles leur répondent des statues d’éléphants.

            C’est devant ce sanctuaire qu’a été dégagée par les archéologues, en 1916, une stèle (brisée en 47 morceaux) Celle-ci rédigée par la reine Indravdevi, la seconde épouse de Jayavarman Vll livre des informations précieuses tels que les nombreux et dramatiques évènements (usurpation, assassinat, invasion…) qui précédèrent l’accession de ce roi.

           Selon une légende, seul le souverain pouvait pénétrer dans le sanctuaire, décrit comme une « tour d’or » où vivait un serpent sacré. La créature prenait tous les soirs la forme d’une femme avec qui l’empereur avait pour obligation de s’accoupler s’il voulait préserver son royaume !... Aujourd’hui ce temple est interdit d’accès, trop dangereux sans doute ! aussi nous continuons et arrivons au pied du :


               ì Baphuôn.  Ce temple situé au Sud du Phiménanakas, en dehors de l’enceinte royale, est un temple hindou dédié à la déesse Shiva. Il est antérieur à la fondation d’Angkor Thom, puisque construit vers 1060 par le roi Udayadityavarman ll.  C’est une pyramide à cinq gradins de 145mx150m, composée de 300 000 pièces de grès de 500 kilos chacune.

           Il fit l’objet d’une restauration de grande ampleur. En 1960, selon le procédé d’anastylose,  toutes ses pierres furent démantelées, répertoriées et déposées sur une aire de 10 ha, mais l’arrivée des kmers rouges en 1970 stoppa cet élan, le conflit indochinois qui suivit provoqua la fin du projet, les ruines du Baphuon furent alors laissées à l’abandon. Ce n’est qu’en 1995, alors que le temple était envahi par la végétation, que les travaux reprirent, dirigés par des architectes français commandant une équipe de 300 ouvriers cambodgiens, ces travaux  durèrent sept ans.

           Depuis 2011, après l’inauguration du Baphuôn restauré en la présence du roi Norodom Sihamoni et de François Fillon, alors 1er ministre français, il est possible d’accéder au sommet de ce temple, mais uniquement en empruntant l’escalier Nord, un escalier de bois, quelques 60 marches…. Ce temple comprenait quatre bibliothèques, à son sommet il n’y a pas cinq sanctuaires comme ça devrait être le cas ! mais un seul, peut-être que les architectes ont pensé que la pyramide construite sur un sol instable, n’aurait pas supporté un tel poids.

           Bunthorn nous a laissé un peu…. un petit peu…. de temps pour visiter ce temple, Cécile assurant ma sécurité derrière moi, je les aie monté ces 60 marches ! hé oui, jusqu’au 5ème étage. De cette hauteur, je profite d’une belle vue panoramique, puis je redescends par le portail Ouest où j’y retrouve Bunthorn et le reste du groupe.

           Cette face du temple nous révèle une sympathique surprise : « Regardez, nous dit Bunthorn,  regardez-bien, vous le voyez là !  le Bouddha couché » Une affiche derrière une vitre en explique sa réalisation.

           Au moment d’assembler les pierres au niveau du 1er  et 2ème étage, les ouvriers ont utilisé de la latérite comme maçonnerie et  avec des tenants ont appareillé des pierres parfois moins épaisses pour réaliser les détails du visage, ce fut un exploit que de dessiner ce bouddha qui occupe tout la largeur de ce coté du temple.

              Continuant ma progression  vers le Sud, j’arrive au Bayon, majestueux et sidérant temple de cette cité fortifiée.  


Bayon





               Le Bayon s’étend sur un périmètre d’environ 150m de coté,  c’est le dernier des « temples montagnes » du site d’Angkor, bâti sur trois niveaux, par Jayavarman Vll à la fin du 12ème siècle. Ce fantastique monument pyramidal avec ses nombreuses tours à quatre visages, fut dédié par le souverain, à Bouddha, quoiqu’on ait retrouvé des éléments hindouistes, peut-être rajoutés par ses successeurs, le roi Jayarvaman Vlll ayant en 1350, converti ce temple à l’hindouisme, la religion alors officielle des khmers.

           Des siècles plus tard, on débat encore sur l’identité de la divinité qui se cache derrière ces visages, énigme devenue le symbole du site d’Angkor.  Au 19ème, les premiers visiteurs ont pensé que c’était le visage de Bouddha, d’autres penchaient plutôt pour Brahma ou Shiva, ou encore Lokeshvara. Aujourd’hui la divinité du Bayon continue à sourire, assurée que son identité demeurera à jamais un mystère !

           Le Bayon, embrassant ainsi toutes les directions, peut étendre la protection de ses dieux à l’ensemble du royaume. De même, les tours à visages ont peut-être pour fonction de propager la compassion de Lokeshvara à chacun des habitants du royaume.

             Les 59 tours à quatre visages, nombre recensé récemment par Olivier Cunin, chercheur français, ont été réparties sur trois niveaux, les deux premiers rectangulaires, le troisième circulaire. Huit tours font partie de la galerie extérieure, les visages de 47 autres sont  orientés vers les points cardinaux, quant à celles qui sont proches du sanctuaire central, elles n'ont que trois visages, même parfois deux.

             Le temple Bayon était un panthéon de dieux représentatif de toutes les divinités vénérées dans le royaume. A chaque niveau, son lot de sanctuaires, de galeries, de fresques. L’unique tour du dernier étage mesure 43 m de haut, un archéologue français trouva en 1935, enterrée sous une dalle à 14 m de profondeur, une statue de pierre de Bouddha, brisée en plusieurs morceaux, sans doute par les Bramas hindous. Celle-ci appelée Mucalinda qui mesurait 3,60m de haut, indique bien la vocation bouddhiste du temple.

             Vous dire ce que j’ai aperçu, il y en a tant à voir ! Je recommande à chacun, lors de cette  visite, d’amener ses jumelles, celles-ci peuvent permettre d’apercevoir le petit détail invisible à l’œil nu. J’ai en déambulant dans ce labyrinthe,  parcouru des galeries où un peu partout se trouvent des sculptures d’apsalas, de devatas, admiré ces danseuses célestes qui en décorent les piliers, fait la rencontre avec un moine qui officie au centre d’une de ses galeries, monté ces niveaux et levé la tête pour admirer au plus près ces fameuses tours-visages, descendu des marches, écouté les explications de Bunthorn, et tout ça sous le regard bienveillant de cette divinité qui a des yeux partout ! oups.. il est vrai que ceux-ci sont fermés …

             Les murs des enceintes, qu’elles soient intérieures ou extérieures sont recouverts à profusion de fresques. 11000 personnages seraient ainsi sculptés. Celles des galeries intérieures sont presque entièrement consacrées à des scènes religieuses d’inspiration hindouiste, de processions royales, de divinités, tandis que les bas-reliefs des galeries extérieures dépeignent des scènes historiques, des faits d’armes ….

           Pour voir correctement, ne serait-ce que ce kilomètre de  bas-reliefs, une journée n’aurait pas suffi, quoiqu’ils doivent être bien abimés et peu déchiffrables, aussi Bunthorn nous amène en voir  qu’ un ! mais le plus célèbre de Bayon et nous en explique quelques scènes.

             Situé sur le mur Sud de l’enceinte extérieure « la Bataille navale »  est une très longue fresque de plusieurs centaines de mètres sur 3,50m de hauteur.  Ce bas-relief est visible depuis 2013 après sa restauration qui aura pris quelques années.  

           Celui-ci est divisé en bandes horizontales appelées registres : l’inférieur et le supérieur. L’inférieur dépeint des scènes se déroulant sur des marchés ou dans des habitations villageoises, en alternance avec des scènes de chasse, c'est ainsi qu'on peut voir au-dessus de la berge, des poissons qui évoluent au milieu d’arbres, ici c’est un chasseur qui vise deux buffles, là c’est une femme étendue qui aidée de voisins va accoucher, ou encore des hommes portant des paniers, ou faisant cuire des brochettes….

             La scène de bataille racontée sur le registre supérieur est une chronique entre l’Empire Khmer et le royaume de Champa. On reconnaît les Champs à leur couvre-chef, casque en forme de lotus renversé, tandis que les Khmers ont la tête nue.

           On y voit Jayavarman Vll représenté arc à la main debout sur une barge royale dont la proue figure un dieu entouré de nagas. Une armada de bateaux khmers surgit de tous cotés pour attaquer quelques bateaux Chams. Ames sensibles s’abstenir, oui je sais que ce ne sont que des sculptures, mais tout de même, car on y voit les soldats tombés à l’eau mangés par les crocodiles, pauvres d'eux ! Cette frise se termine par la victoire du roi, celui-ci est entouré de musiciens, un danseur exécute une danse de la victoire.  


              Je fais mes adieux au temple du Bayon, certainement un de mes plus beaux souvenirs, même si ce fut, encore une fois, trop court, mais les jambes commencent à se ressentir de ce long piétinement, aussi marcher pour emprunter la longue allée qui mène à la porte Sud où attend Bunthorn est très agréable. La dernière photo que je prends de ce Bayon sera pour ces gardiens du temple que sont les lions ou les nagas (serpent terrifiant à sept têtes) ceux-ci situés aux points cardinaux, protègent les lieux du mauvais esprit.

             Allez encore un coup d’œil sur cette merveille, qui vue ainsi avec le plan d’eau devant est magnifique. Une dernière photo, je ne m’en lasse pas ! j'y serais bien restée plusieurs minutes de plus !...

            Angkor Thom possède quatre portes situées sur les axes cardinaux de la ville.  Avec mes compagnons, depuis le Bayon je me dirige vers la porte Sud, mais nous sommes vite arrêtés dans notre marche par la présence de macaques. Ceux-ci ne paraissent pas bien méchants, mais nous a dit Bunthorn « Ce ne sont pas des singes domestiqués, méfiez-vous d’eux, ils peuvent être agressifs » aussi je me contente de les immortaliser.

                 Même si les temples de Ta Prohm et du Bayon se sont quelque peu éloignés, il ne faut pas oublier que nous sommes toujours dans l’enceinte d’un monde sacré, ce qui peut peut-être expliquer, à l’approche de la porte, ces rangées de 54 statues chacune, représentant d’un coté les dieux  (devas) de l’autre les démons (asuras) certaines portant un naga géant.

             Ces sculptures servent de balustrade au pont qui enjambe les douves. La porte Sud, ainsi que les statues ont été entièrement restaurées dans les années 1950, la plupart des têtes des dieux et des démons, abimées ou volées, ont été remplacées par des copies, mais l’ensemble reste cependant majestueux.

           Et inexorablement j’arrive à cette porte, la porte Sud. Haute de 23 mètres, c’est une triple tour sculptée de quatre visages d’Avalokitésvara, le plus populaire des Bodhisattvas, ça seraient les traits de Jayavarman Vll paraît-il !

                 La découverte d’Angkor Thom est maintenant terminée ! nous avons rejoint le chauffeur et son bus rouge. Than va maintenant, après ce petit répit, nous mener au restaurant Neary Khmer de Siem Reap où doit nous être servi un repas khmer !

                 Cette après-midi, les pieds seront à peine reposés, que nous repartirons pour visiter Angkor Wat, le temple le plus grand et le mieux conservé des monuments d’Angkor. Alors ne manquez surtout pas de me suivre dans ce périble angkorien, et pour cela je vous donne rendez-vous à la page suivante.

                 A tout de suite !

      Angkor Wat