Dimanche 15 Décembre 2019
8 heures. C’est,
comme chaque matin par une journée bien ensoleillée
que Than se dirige vers Banteay
Srei.
On a pourtant bien failli ne pas voir cette merveille, une barrière
campée au milieu de la route nous en interdisant l’accès, fait sans doute pas
très fréquent car Than a l’air d’en être surpris.
Allez chauffeur une petite manœuvre !
après un
demi-tour difficile au beau milieu de la chaussée, il prend un chemin de terre bosselé,
aille les secousses ! pour parvenir à proximité du temple. Mais
n’était-ce pas indiqué sur la pancarte !
ì Banteay Strei, appelé aussi « la citadelle des femmes » est situé à une trentaine de kilomètres au Nord-Est de Phnom Penn, ainsi qu’à une quinzaine au Nord-Est d’Angkor-Thom, qui était à l’époque la capitale. (point N° 22 carte itinéraire)
Le temple est constitué de trois enceintes. Après un premier franchissement, je parcours une allée longue de 88 m. encadrée de bornes et de galeries, celle-ci mène au temple. Sur le fronton de l’une d’elles, j’aperçois Shiva et Uma chevauchant le taureau Nandin.
La caractéristique de ce temple, c’est qu’il n’a pas été érigé par un roi, mais en 967, par deux brahames : Yajnavaraha, guru (maître spirituel et conseiller) du roi Jayavarman V et son frère cadet Vishnukumara.
Sa modicité, le mot n’est peut être pas tout à fait approprié… peut provenir de différentes raisons : ne pas faire aussi bien que le roi, mais l’auraient-ils voulu qu’ils n’en auraient sans doute pas eu les moyens ? ou peut-être aussi que le grès employé ici, un grès rose d’excellente qualité, n’était pas disponible en grande quantité.
La teinte rosée de son grès, la finesse de ses bas-reliefs et la petitesse de Banteay Srei lui ont valu le surnom de « joyau de l’art kmer »
Il a été entièrement restauré entre 1931 et 1936, sous la direction d’Henri Marchal, par la méthode de l’anastylose, une innovation à Angkor (Technique mise en œuvre pour la 1ère fois par les archéologues hollandais qui travaillaient sur les temples en Indonésie. Les pierres sont retirées, numérotées, des nouvelles fondations saines sont alors construites, les pierres replacées, les manquantes ne sont pas sculptées, de manière à ce que la substitution soit apparente)
Ici, presque chaque centimètre carré à été
sculpté et la pierre utilisée ici étant d’excellence qualité, les sculpteurs
ont pu donner toute la mesure de
leur talent. C’est à Banteay Strei qu’apparaissent pour la 1ère
fois les frontons décrivant des scènes mythologiques, avec entres-autres
l’épopée indienne Ramayana.
Là sur ce portail d’entrée, on aperçoit la
déesse Indra chevauchant l’éléphant Airavata, Sur le fronton d’une porte de la troisième
enceinte, surface mesurant 100 mètres sur 90 mètres, est sculpté le combat
entre Valin et Sagrina. Les toits des galeries et de tous les bâtiments
annexes étaient couverts de tuiles vernissées reposant sur une charpente de
bois
C’est alors que Bunthorn qui nous fait faire le
tour de ce périmètre sort son arme secrète : l’endroit idéal qui fera que
cette photo sera, pour moi ! la plus belle de cette matinée :
le jeu d’ombres, les arbres et le temple se reflétant dans les étroits fossés
qui ondulent, aujourd’hui remplis d’eau, bravo et merci !
Juste avant d’arriver
au sanctuaire central, se trouvent les deux bibliothèques, une à l’Ouest,
l’autre à l’Est. Le fronton de la bibliothèque Est raconte en personnages
finement sculptés l’histoire mythologique de Ravana, qui secoue, avec
ses nombreux têtes et bras, le Mont Kailasha.
Le sanctuaire central (24m x 24m) contient des
autels dédiés aux divinités Vishnou et Shiva. Des cordons nous
en interdisent l’accès, il serait paraît-il interdit à la foule ! mais à
cet instant nous ne sommes pratiquement que le groupe…
De toute façon de
terrifiants gardiens postés de part et d’autre de chaque flopée de marches, nous
auraient empêchés d’y entrer…. Aujourd’hui ces personnages à corps humain et à
tête animale sont des copies réalisées en 2000, certains des originaux furent
même volés.
André Malraux lui-même, accompagné de son épouse et d’un ami furent
pris la main dans le sac en 1923, hé oui !.... en essayant de dérober des
bas-reliefs et autres éléments du site encore peu connu… Suite à ce méfait prémédité, il fut, tout
d'abord pendant plusieurs mois, assigné à résidence, puis condamné à trois ans de prison ferme, peine finalement
réduite à un an avec sursis, grâce aux relations littéraires de sa brillantissime épouse,
il l'a échappé belle notre illustre écrivain !
Il aurait fallu des jumelles pour discerner tous ces minuscules détails, quasiment invisibles à l’œil nu, j’arrive toutefois à apercevoir cachées dans des niches, les sculptures de déesses avec leurs cheveux noués en chignon, arborant de lourds bijoux. Un peu partout, de fausse-fenêtres aveugles, parfois occultées de colonnades sculptées contribuent à faire de ce lieu, un endroit majestueux.
Les portes du sanctuaire central sont très basses, elles dépassent à peine 1 mètre.
Comme c’est
pratiquement le cas dans tous les temples d’Angkor, à chaque entrée ou sortie,
un orchestre de musiciens handicapés proposent leur cd de musique
traditionnelle, ils seraient ainsi 66000 pauvres victimes innocentes de
l’agent orange.
Depuis le parking,
Bunthorn après avoir acheté du jus de palme à un vendeur ambulant, propose un
verre à qui le veut, c’est désaltérant, puis nous reprenons place dans le bus pour aller découvrir, ce qui
sera le dernier temple du voyage, celui de Banteay Samré.
Une vingtaine de kilomètres sépare ces deux sites, les villages traversés sont constitués pour la plupart de maisons sur pilotis.
L’histoire a du mal à situer exactement la date de sa fondation, sous Suryarvarman ll, d’après certains, mais d’autres pensent, vu la présence de Bouddhas, qu’il a été construit plus tard probablement sous le règne de Dharanindravarman ll, père de Jayavarman Vll, et fervent bouddhiste. On le situe toutefois moitié du 12ème siècle car il présente une iconographie essentiellement hindouiste.
Il est situé à une poignée de kilomètres à l’Est de Ta Prohm.
Ce temple est un peu méconnu des touristes, ce
qui peut peut-être expliquer pourquoi les gamines nous sautent littéralement
dessus, elles proposent, stockées dans des cagettes qu’elles trimballent avec
elles, à la façon du vendeur de friandises à l’entracte d’un cinéma, enfin à
une certaine époque….. toutes sortes de babioles, breloques, bracelets, moulins
à vent. Tout est à un dollar, mais que ferais-je d’un moulin à vent ?...
les mamans vendent des tee-shirt.
Alors prévoyez quelques uns de ces billets, ça fera
des heureux, et pourtant le téléphone portable est déjà dans la main de ces
gamins de huit-neuf ans…
Collants… ils vous escortent jusqu’à l’entrée du site, attendent
patiemment que vous ayez visité pour vous raccompagner au bus, des fois
que !...….
Depuis la borne indiquant l’entrée Nord du Temple, nous parcourons, donc bien accompagnés, ce chemin ombragé de plusieurs centaines de mètres,
ì Banteay Samré, n’est qu’un temple parmi le
millier de lieux sacrés qui furent édifiés par les rois khmers, avec des
frontons et linteaux qui dépeignent de très nombreuses scènes mythologiques, en
majorités liées à l’hindouisme : Shiva et Uma chevauchant Nandin, Shanda
sur son oie sauvage, Krishna, Vishnu, Valin, des divinités, des démons, des
singes, des nymphes….
Après avoir franchi le portail de la seconde enceinte (87m sur 81m) je me trouve sur une terrasse cruciforme, gardée par des lions, les pauvres, les siècles leur en ont fait perdre la tête !
De marches en marches, j’arrive à proximité de la première enceinte (40x45m) qui est elle aussi, bâtie sur un haut soubassement, que j’estime à 1,50m, à cet instant les escaliers de celle-ci sont si proches du sanctuaire central que l’espace semble être divisé en quatre petites cours. .
A part deux ou trois touristes isolés, nous ne sommes que nous, quel calme ! Depuis ces hauteurs, je contemple face à moi, précédé d'un mandapa, le sanctuaire central très finement structuré, en forme de bouton de fleur de lotus, il mesure plus de 20 mètres de haut. Un mandapa est une salle à colonnes dans l’architecture des temples hindouistes qui se situe entre l’entrée du temple et le saint des saints, ça peut être aussi une pièce de méditation.
Dans la pénombre de ce sanctuaire, je devine plus que je n’aperçois, un cube, qu’est-ce ? peut-être une urne funéraire.
Le temple a fait l’objet d’une restauration complète de 1936 à 1944. La méthode de l’anastylose y fut employée avec succès par Maurice Glaise, Conservateur des monuments à cette époque.
Ce n’est pas sans un petit serrement au cœur que je
quitte ce site des temples d’Angkor, à défaut d’avoir pu profiter de tous, il
en a tant ! je crois que j’ai découvert les principaux avec chacun leurs propres caractéristiques : Ta Prohm
aujourd’hui envahi par les spungs qui, telles les griffes d’un rapace, les enserrent
de leurs racines, le Bayon et ses impressionnants visages sculptés, Wat
majestueux avec ses cinq sanctuaires en forme de boutons de lotus et
aujourd’hui ces deux temples certes d’une taille plus modeste : Banteay
Srei et Banteay Samré mais non moins charmants et
finalement plus accessibles, car je regrette toujours de n’avoir pu aller au sommet du sanctuaire
sacré de Wat, escalier trop long et trop raide.
Dommage aussi de ne pas avoir pu accéder au sanctuaire central de Banteay Srei, étant quasiment seuls sur le site, j’aurais certainement apprécié davantage l’explication des bas-reliefs sculptés sur les frontons si j’avais eu l'occasion de voir ceux-ci de près.
Arrive l’heure du déjeuner, celui-ci se prend au Soktea Mao, restaurant-collection de Siem Reap.
Après le repas, il est prévue une promenade en bateau sur le lac Tonlé Sap à la découverte de ses villages flottants.
Alors ne manquez pas de m’y accompagner.
A tout de suite !