Mardi 24
Septembre.
Oh
que c’est dur de se lever ce matin ! faut dire aussi qu’il m’est arrivée
une drôle de mésaventure cette nuit : il est à peine 1h, un bruit à percer
les tympans me réveille….à moitié dans les bras de Morphée, je ne sais plus
trop où je suis…. et met un moment avant de m’apercevoir que c’est le détecteur
de fumée qui fait des siennes…… J’attends, espérant que ça va s’arrêter, oui je
sais !.... j’aurais dû me lever et aller à l’accueil de l’hôtel (parce
qu’au téléphone : I do not speak very quite English !...) mais mon
corps est plus lourd que du plomb, et malgré ce bruit infernal, j’arriverais à me rendormir
plus tard…. beaucoup plus tard… trois bonnes heures avant que cette fois ça ne
soit la sonnerie du téléphone qui me réveille.
Allez Thérèse, go, faut y
aller !...
Et pourtant !..... bien que ce matin, le départ soit de très bonne heure, quoique je n’ai pas dormi ou si peu, je prends le temps d’aller faire un petit tour derrière l’hôtel emprisonner ces superbes images de la rive du Colorado, flamboyante sous les rayons du soleil levant.
Départ à 7h30. Kenny regagne l'Interstate 40, nous sommes maintenant dans l’état d’Arizona et allons à l’assaut du plateau du Colorado. Il y a beaucoup de « miles » avant d’arriver au grand canyon, aussi Emily nous parle d’elle : elle a 32 ans et est célibataire, élevée par ses grands parents qui l’ont souvent emmenée en voyage, elle y prendra goût et décidera d’en faire carrière. Plus tard, elle étudie à l’Université et passe avec succès ses examens. Elle fait le métier de guide depuis trois ans, son français très correct elle le doit aussi en partie à des séjours en France, un mois à Annecy, sept mois à Toulouse.
« Nous
allons passer quinze jours ensemble, nous serons alors une grande famille »
Ce sont ses propos, afin que chacun de nous connaisse un peu mieux les autres, elle
propose sans obligation de se prêter à un petit jeu sympa : sur une
feuille de papier, chacun d’entre nous devra sous formes de trois phrases, se
présenter tel qu’il le souhaite, deux phrases devront être vraies, l’autre
fausse, aux autres de deviner celle qui selon eux ne correspond pas au
personnage nommé. C’est ainsi que nous apprenons que Caroline prétend être juge
d’instruction, Monique être divorcée, Bernadette habiterait une île bretonne, hou,
les menteuses !....
ou que Guy voyage depuis 18 ans avec
le même couple d’amis.
Cet homme né en 1927 a connu bien des tourments durant sa vie, le principal aura été de voir sa ville mourir (bâtiments à l’abandon, entreprises qui ferment…) lorsque l’interstate 40 réduira à néant la fréquentation de la route 66 en 1978. Il y exerçait depuis 1950 le métier de barbier-coiffeur, quoiqu’en retraite depuis 1995, il aime à l’occasion raser….
Surtout connu pour être le premier à s’être battu pour que cette mythique route ne soit pas oubliée, il a fondé une association pour son classement en « Historique Route 66 » Cette association de l’Arizona créée en 1987 sera suivie par les huit états concernés avec comme objectifs : préserver la route. De par son action, il a été surnommé le père de la Mother Road, « l’ange gardien de la U.S.route 66 »
Le décor du bâtiment n’a pas changé depuis cinquante ans, il est aujourd’hui rempli d’antiquités, de cartes de visites, de photos des voyageurs, mais aussi de cadeaux originaux, de souvenirs, on peut d’ailleurs toujours y voir son fauteuil de barbier. Venir ici, c’est remercier Angel de son obstination, c’est tenir vivant ce mythe de la route 66, vous pourrez aussi y faire tamponner votre passeport. Monique est contente car elle a réussi à se faire prendre en photo avec lui.
« Snow
Cap » ce restaurant a proximité a été ouvert en 1953 par le frère
d’Angel : Juan Delgadillo. Ce monsieur au sens de l’humour très prononcé accueille
ses clients par ce panneau « Sorry, we are open ! » Pour
attirer leur attention, il a installé devant le bâtiment une Chevrolet de 1936
dont il a coupé le toit, puis l’a peinte, orné de klaxons et autres objets
aussi inutiles que puérils, une véritable attraction !
Tout à coté, un endroit d’aisance (baraque en planches)…. recouverts de panneaux humoristiques, tels que « Ne pas déranger l’occupant » ou encore « Air conditionné »
Et nous y
voilà…. J’y suis presque…. Dans quelques minutes j’aurais devant mes yeux certainement
ébahis, un des spectacles les plus fabuleux au monde une des merveilles les
plus grandioses, presque pour moi seule tant ce canyon est immense ! Carte du site téléchargeable en PDF
L’histoire du Grand Canyon en quelques lignes : Il y a déjà un
certain temps !....... la plaque pacifique heurtant régulièrement la
plaque nord américaine souleva le plateau du Colorado et créa les montagnes
rocheuses. Le fleuve Colorado, très puissant, alimenté par la fonte des neiges,
les eaux de pluies et par ses affluents se fraya un chemin, creusa pendant 3 à
4 millions d’années. Avec la complicité des mers, des rivières, du vent, il charia
une quantité impressionnante de débris de sable, sels, sédiments, d’où son nom
(fleuve rouge en espagnol) Les roches charriées ont pour les plus jeunes 1
million d’années, et pour les plus anciennes au moins 1,7 milliard d’années, On
aperçoit nettement les différentes couches de strates, chaque couche de grès
représentant une ère.
Le canyon a été probablement occupé par les tribus Anasazi entre 500 et 120 avant JC. En 1540 les Espagnols passèrent tout près, mais devant la difficulté renoncèrent à franchir la gorge. Ce n’est qu’en 1869, l’Arizona étant acquis par les Etats-Unis, que John Wesley Powell franchit pour la première fois le Colorado à travers le Grand Canyon, cet endroit unique retint alors l’attention des autorités et du grand public. Les prospecteurs arrivèrent dès les années 1880 et les touristes commencèrent à affluer à la fin du 19ème siècle.
Le
parc fondé en 1919 et inscrit au patrimoine mondial de l’humanité en 1979
protège un sillon de 447 kms allant du lac Mead (Ouest) au lac Powell (Est), seule
une petite partie est accessible, à certains endroits il est même possible de
descendre au fond du canyon. Ses deux rives sont éloignées en moyenne de 10
miles (16 kms) mais l’écartement peut aller jusqu’à 30 kms, sa profondeur environne
les 1600m, l’altitude à sa rive Nord est de 2430 m, la rive Sud : 2100
mètres.
Ce parc possède une flore: pins pignons, genévriers de l’Utah, cactus, et une faune intéressante : différentes espèces d’oiseaux, écureuils, cerfs, renards, condors de Californie, coyotes, lynx, pumas, divers poissons. …
Le
grand canyon offre diverses activités : son exploration profonde permise
à l’aide de 4 sentiers balisés qui y descendent, à utiliser avec toutes les
précautions d’usage car il faudra bien remonter ! ou plus
confortablement, la promenade à dos de mule. Pour les sportifs : du
rafting, et beaucoup moins fatiguant : le survol en avion ou hélicoptère.
Nous arrivons par la rive sud (south rim) et entrons dans un espace nommé « Grand canyon village » c’est là que les principaux belvédères sont accessibles, c’est là aussi que vous trouverez à vous loger : campings ou Lodges.
Premier
arrêt : Bright Angel. Du parking un chemin d’environ 200m nous mène à un « point
de vue » et là !!! même si on a déjà vu des photos, même si on
s’attend à ce qu’on va y voir ! c’est tout de même le choc, il n’y a pas de mots
pour décrire cette immensité. Derrière le rideau d’arbres, se dévoile un petit
morceau, un fragment de la gorge : des falaises et buttes rocheuses
balayées par l’ombre d’elles mêmes, tant le soleil est intense.
Mon cerveau bouillonne, imprime pour toujours ces images, car aucun film, aucune photo n’arrivera jamais à retranscrire cette vision de gigantesques roches érodées, dont les couches de couleurs tranchent les unes avec les autres, éparpillées dans cette immense fissure, ou ces si minuscules sapins, là bas presque au fond..
De
cet endroit part un sentier qui descend au fond du canyon et rejoint l’autre
rive : Bright Angel Trail. Est-ce ce sentier qui gros comme un fil
apparaît sur quelques photos prises du belvédère suivant ? à moins que ça
ne soit le tracé du Kaibab Trail par où descendent les mules.
" Pourquoi devoir se contenter seulement
d'un belvedère ! pourquoi n'irait-on pas voir
de plus bas ce magnifique canyon " C'est ce qu'ont dû se dire Jean-Michel et Guy, qui ne résisteront pas, malgré le peu de temps disponible, à
l'envie de descendre et de....remonter quelques longueurs de ce sentier. C'est à eux deux que je dois, entres autres,
les trois photos ci-dessous prises depuis le chemin de ce "Bright Angel Trail". Merci et ...bravo !
Second
arrêt : Mather Point. Cet endroit a été entièrement réaménagé
entre 2009 et 2011.
Tout y est prévu pour le bien être du randonneur, ou plus simplement du contemplateur : un Visitor Center, avec boutique de souvenirs, café, toilettes, 3 immenses parkings et un sentier goudronné de plusieurs centaines de mètres vous mettant aux premières loges pour admirer ce tronçon du Grand Canyon. Il est bien évident que ce décor presque irréel fut maintes fois utilisé pour des films ou de la publicité.
Ce sentier, le « Rim Trail » est une magnifique promenade qui permet de suivre, sans aucune difficulté un circuit de 19 miles de Pipe Creek jusqu’à Hermits Rest.
Emily a donné carte blanche jusqu’à 14h30 pour ceux qui veulent survoler le canyon et 15h30 pour les autres. Pendant les 70 minutes de disponible, il est bien évident que personne ne va jouer aux aventuriers, mais ça sera tout de même une superbe balade que de longer sur deux bons kilomètres ce « rim trail » de découvrir ces promontoires ravinés qui se succèdent depuis la rive Sud du canyon.
14h30. Nous sommes 17 à avoir opté pour cette excursion optionnelle, en hélicoptère ça sera 195 dollars, en avion 175 dollars.
Nous en laissons 3 en chemin et arrivons à l’aéroport de Tusayan (30 mns de Mather Point) dans les locaux de la Compagnie Westwind Air.
Emily
suivant les directives des pilotes a réparti son mini-groupe, 5 dans un avion
et 9 dans l’autre, ces avions sont des Cesna bien équipés pour ce genre de
balade avec, contrairement à l’hélicoptère, un siège par fenêtre.
Voici ce
qu’on peut lire en résumé sur leur site : La manière la plus unique de
voir le grand canyon est sur un vol de Weswind. De l’aéroport, envolez vous tel
un aigle vers la partie la plus large et la plus profonde d’une ses sept
merveilles naturelles du monde. L’altitude fournit des vues spectaculaires sur
le désert et la réserve des Navajo à l’est. Faire le tour du confluent
du Colorado. Vous aurez des points de vue du plateau de Kaibab et de la réserve
forestière de Kaibab.
Et nous voilà devant cette machine qui va nous élever quelques centaines de mètres au-dessus du Canyon.
Nous faisons
la connaissance de Kiff notre sympathique et souriant pilote, il invite
alors Maguy à se mettre à coté de lui, j’avoue que ma confiance est bien
limitée en ce qui concerne ce co-pilote improvisé !...
Emily nous avait promis des commentaires en français, nous devrons nous contenter, d’écouter dans le casque de la musique qui couvrira le bruit de l’avion.
Les 45 minutes de survol furent du pur bonheur, si je devais le résumer en un seul et unique mot, je dirais : génial !
Alors que depuis les belvédères il est impossible d’apercevoir le Colorado, là, serpentant aux pieds des roches je le découvre. Dommage qu’à cause de l’heure tardive, il n’est pourtant que 17h… les roches sont en partie dans la pénombre, à cause d’un soleil déjà bas.
Au-revoir Grand Canyon…
Nous faisons
demi-tour vers le sud en direction de Flagstaff situé à 2100m d’altitude pour
rejoindre directement le restaurant. Celui-ci sera le « Cracker Barrel,
Old Country Store »
« Cracker Barrel Old Country Store » est une chaîne américaine de restaurants
combinés avec des boutiques cadeaux dont l’aspect extérieur
imite celui d'un magasin
traditionnel du Sud à la fin du XIXe siècle.
Chaque restaurant dispose d’une véranda où sont alignés des rocking-chairs.
« Cracker
Barrel » signifie en français : « tonneau du sudiste »
Le logo que l’on voit d’ailleurs représente un homme, un paysan, assis à coté d’un
tonneau. Entre le 19ème et le 20ème siècle une bonne
partie des produits alimentaires était vendue au poids ou au volume dans les « General
Store » américains, ainsi que les biscuits que l’on nomme « Crackers »
qui étaient livrés en tonneaux chez les détaillants, d’où le nom « Cracker
Barrel »
« Cracker Barrel » est fondé en 1969 par Dan Evins, qui voulait concevoir un endroit confortable où l’on pouvait s’arrêter prendre un bon repas avec à proximité un magasin où l’on trouverait un peu de ce qui rappelait notre enfance : grands bocaux de bonbons, confitures maison, vrai beurre, biscuits, cadeaux, musique country, anciens jouets, objets artisanaux etc.
Les éléments
de décor comprennent généralement des objets artisanaux liés à l'histoire
locale de la région, des ustensiles de la
vie courante des années 1900.
Un coin est consacré déjà !... à Noël : arbre décoré, boules scintillantes…..de quoi faire briller nos yeux d’éternels gamins.
Sur la table, un « jeu de peg » artisanal, (sorte de solitaire) mis à la disposition du client, pour le faire patienter le temps que le repas arrive. Ce jeu est fabriqué par un fabricant local et les trous percés à la main.
Notre hôtel
est ASPEN INN 1008 Historic US 66 à Flagstaff, contrairement aux deux
précédents celui-ci est tout petit, un motel de seulement deux étages, nous
sommes tous logés au RDC, appréciable ! Une petite appréhension cependant,
nous sommes du coté route et pas de n ‘importe laquelle : la 66, beaucoup
de camions y circulent, ça ne promet pas une nuit calme, mais finalement
celle-ci sera tranquille, les « routiers ont été sympas » !
Les chambres sont disposées avec goût et beaucoup d’imagination : dessus de lit finement arrangé, linge de toilette présenté en éventail, même le mouchoir en papier dans son écrin décoré n’y a pas échappé, quel dommage de devoir rompre cette si parfaite harmonie !
Bonne nuit et à demain, nous commencerons la journée par la découverte d’un impressionnant cratère fait par la chute d’un météore.
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